Si la vaccination contre la grippe réalisée en pharmacie dans les zones déficitaires en offre de soin était une bonne idée de derniers recours afin d'améliorer la couverture vaccinale,
elle l'est beaucoup moins dans tout le reste du territoire.Les puissants syndicats de pharmacie ont profité de la porte entre-ouverte par le ministère de la santé pour s'y engouffrer,
utilisant l'alibi de la couverture vaccinale insuffisante pour réaliser une concurrence vénale déloyale à l'encontre des infirmiers et infirmières libéraux ainsi que des médecins généralistes.Cette "ubérisation" de notre système de santé symptôme d'un hyper libéralisme dérégulateur qui tient la santé comme le reste pour un simple bien marchand sera inévitablement délétère pour le patient
Pourtant les pharmaciens semblaient rétifs à ce genre de dérives, effrayés par les véléités sanitaires et thérapeutiques de la grande distribution comme l'enseigne LECLERC.
L'adage de ne pas réaliser envers autrui ce que l'on ne voudrait pas que l'on fasse à soi même semble avoir clairement été effacé de la mémoire collective du monde officinal....
Plutôt qu'un simple exercice de rhétorique idéologique flou sur la dégradation du système sanitaire, nos décisionnaires et les "vaccinateurs" improvisés devraient s'imprégner de ces quelques interrogations et nous fournir des réponses crédibles :
- Qu'en est il du coût global de la vaccination anti-grippale pour la collectivité sachant que les médecins intègrent bien souvent cette vaccination dans une consultation globale de suivi sans aucune tarification supplémentaire à contrario du pharmacien qui lui sera systématiquement payé ?
- Qu'en est il de l'activité de l'IDE dont la vaccination anti-grippale rapide et peu rémunératrice (de l'ordre de 7 euros à domicile...) vient compenser un peu les actes de soins longs , difficiles, parfois sales et mal rémunérés ?
- Qu'en est il de la technicité d'un geste reproduit quotidiennement par médecins et corps infirmier depuis leur formation initiale et improvisé une fois par an par des pharmaciens qui n'ont aucune vocation à pratiquer des gestes techniques sur l'humain (sinon n'auraient ils pas fait médecine, ou maïeutique, ou dentaire, ou infirmier, ou kiné ?)
- Qui assurera le SAV de la vaccination : malaise vagal lors de l'injection, effets indésirables multiples à court terme ou moyen terme du pic fébrle simple au guillain barré...?
Aimer assurer son confort matériel n'est pas un défaut, mais le faire en dérogeant au principe des attributions d'expertise de chacun est autre chose .
L'exercice officinal devrait se concentrer sur l'expertise pharmacologique, seulement l'expertise pharmacologique et rien que l'expertise pharmacologique.
- Pourquoi prendre des TA dans des conditions qui n'ont aucun rapport avec les préconisations des collèges d'expert cardiologiques et qui amènent au cabinet des patients effrayés par des chiffres fantaisistes ?
- Pourquoi réaliser des audiogrammes grossiers et vendre des Sonalto qui n'ont aucun rapport avec l'audiogramme réalisé par un ORL, intégré dans un dépistage autrement plus scientifique sans le risque de passer à coté d'une pathologie ne souffrant d'aucun retard et laisser aux audioprothésistes le soin de vendre de véritables amplificateurs ?
- Pourquoi réaliser des strepto tests distribués en catimini par la sécurité sociale dans les officines sans avoir aucune formation, ni pratique sur l'examen d'un fond de gorge et de l'ensemble de la sphère ORL et qui relève d'une pratique quotidienne de l'ORL ou du médecin généraliste.
Et malgré toutes ces interrogations, et en dépit de la iatrogénie conséquente provoquée par la vente libre de l'ibuprofène, de l'oméprazole, de crèmes cortisonées, de vaso-constricteurs per os... résonne déjà le bruissement de l'extension de la vaccination en pharmacie à d'autres classes vaccinales ou à la prescription par les officinaux d'antibiotiques urinaires.....
Bref si un simple conducteur de véhicule peut aujourd'hui se reconvertir en taxi, un propriétaire de studios bien situés dans la capitale en quasi hôtelier professionnel, effectivement on comprend l'appétence commerciale du pharmacien pour accroître ses sources de revenus puisque les pouvoirs publics semblent avoir décidés dans un grand relativisme économique, notre jupitérien président en tête que l'expertise professionnelle était interchangeable et qu'il suffisait de changer de trottoir pour changer de profession...
Souhaitant prendre part à ce dépeçage parfaitement mûri et organisé de notre système de soin, il deviendrait raisonnable de vendre des vaccins anti-grippe dans nos cabinets, d'avoir des stocks de collutoires, pastilles et autres antalgiques dans nos étagères à prix concurrentiels et bien entendu permettre aux pharmaciens la pratique du TR et autres examens proctologiques car il n'y a aucune raison que nous nous nous accaparions les splendeurs du métier !