22 avril 2024
Les manifestations en début de cette année 2024 de "petits" agriculteurs, éleveurs bovins ou producteurs bio, entre autres, pour disposer d’un salaire décent furent légitimes. Elles furent hélas vite récupérées par la Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FNSEA) qui a accusé les écolos, les agences de l’eau et les comités locaux de l’eau de les empêcher de travailler et qui a organisé un bras de fer avec le gouvernement pour obtenir un abaissement voire une annulation des normes environnementales. Gabriel Attal, premier ministre, a annoncé, dès fin janvier, dix mesures de simplification immédiate, notamment la mise à l’arrêt du plan Ecophyto, qui, bien que peu efficace, signe la mort des mesures destinées à réduire l’usage des pesticides, dix mesures qui sacrifie l’écologie, qui fait porter la responsabilité des difficultés des agriculteurs aux mesures environnementales et qui en fait une crise d’accès à l’eau.
L’actuel ministère de l’agriculture, Marc Fesneau, qui a succédé le 20 mai 2022 à Julien Denormandie au poste de ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, a travaillé auparavant à la Chambre d’agriculture du département du Loir-et-Cher aux mains de la Fédération départementale (FDSEA) où il fût directeur du service chargé des politiques de développement local et des fonds européens. Il est de connivence avec les exploitants de l’agriculture industrielle productiviste et il a très vite pris le parti des gros céréaliers, satisfaisant à leurs revendications, au grand désavantage des politiques de protection des eaux.
Marc Fesneau a annoncé le 28 mars, lors du congrès de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), une simplification des procédures de construction de méga-bassines pour les agriculteurs irrigants, promettant la création d'une centaine de méga-bassines cette année.
A ce même congrès, il a déclaré qu'il fallait changer la gouvernance de l'eau. Il a en effet évoqué une réforme de la gouvernance des agences de l'eau, qui fait craindre aux présidents des sept Comités de bassin, les Parlements de l'eau chargés d'assurer la concertation et la définition de la politique locale de l'eau sur chacun des grands bassins versants, de voir "mourir" les Agences de l'eau.
Depuis des décennies, l'Etat cherche à récupérer l'argent de la "parafiscalité" que gèrent les agences de l'eau lesquelles collectent environ 2 milliards d'euros chaque année auprès des usagers pour financer des projets territoriaux liés à l'eau. Dès 1977, un rapport commandé à Michel Rocard visait à supprimer les agences de l'eau. Or, à l'issue de son travail, Michel Rocard a recommandé l'inverse, préconisant de ne surtout pas toucher à cette institution. En 2017 également, la Loi de finances prévisionnelles faisait craindre que l'Etat soit déterminé "à faire les poches" de toutes les collectivités et de bien d'autres structures, notamment les Agences de l'eau, soulevant un tollé général.
Thierry Burlot, président du Comité de bassin Loire-Bretagne, rappelle la pertinence de la Loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 qui a créé six agences, une Loi qui fait référence dans le monde entier et qui pose trois principes-phares :
- une politique de l'eau cohérente qui oblige à prendre en compte l'unité hydrographique, un fleuve devant se gérer de la source à l'estuaire,
- une politique de l'eau réussie qui nécessite de réunir tous les acteurs autour de la table selon le principe de la démocratie participative (hélas abîmé par le "poids" excessif des préfets et des lobbies agro-industriels au sein des agences ou des comités de bassin, dénoncé par des acteurs locaux).
- une politique de l'eau efficace qui a besoin d'argent, d'où la création d'une redevance, une fiscalité gérée par les agences de l'eau où chacun contribue à sa juste mesure (devrait contribuer car 75% de la redevance des agriculteurs est payée par les usagers de l'eau !).
A propos des super-bassines, Thiery Burlot estime que le ministre de l'agriculture et les agriculteurs se trompent s'ils pensent passer en force. Il conseille de tirer les leçons de ce qui s'est passé à Sainte-Soline et d'essayer de créer du consensus. "Penser qu'on peut régler des sujets aussi complexes par un tour de force n'est pas sérieux. Si on accepte une mainmise de l'agro-industrie sur ces questions, on court à la catastrophe."
Le Collectif "Nous sommes l'Eau" considère qu'il est complètement immoral de provoquer volontairement un assèchement des ressources en eau, une altération de la qualité de l'eau potable et une dégradation de la santé des habitants en favorisant les méthodes mortifères, dilapidatrices et pervertisseuses de l'eau, de l'agriculture industrielle productiviste.
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