LETTRE OUVERTE/PÉTITION À MONSIEUR LE PRÉFET DE VAUCLUSE
Avignon, novembre 2025
Monsieur le Préfet,
Quelques faits divers montés en épingle dans les médias et des déclarations gouvernementales font croire que les étrangers frappés d'OQTF (Obligations de Quitter le Territoire Français) seraient tous des délinquants ou des criminels. Une désinformation qui attise la haine, au mépris de la réalité.
Dans leur grande majorité, les Obligations de Quitter le Territoire Français touchent indistinctement des personnes pacifiques déjà insérées dans notre société et dans notre économie, en situation de travail, voire dans des professions où la main-d'œuvre manque. Les dernières lois immigrations sont si restrictives qu'il suffit d'un détail parfois insignifiant dans leur situation administrative pour justifier ce couperet, qui ferme toutes les portes d'un avenir qu'ils peinaient déjà tant à construire.
Monsieur le Préfet, derrière ces quatre lettres OQTF, il y a des situations dramatiques, des êtres humains jetés dans la précarité, des souffrances. En voici un exemple parmi des centaines d'autres tout aussi injustes.
Fatou (son prénom est modifié pour préserver son anonymat) est ivoirienne. Elle a 18 ans et travaille depuis février 2025 dans une boulangerie où elle fait un apprentissage en alternance d'employée commerciale. Elle est très appréciée de son patron et de ses collègues.
Fatou est venue en France en 2023 pour échapper à son oncle qui, à l'âge de 13 ans, l'avait mariée de force à un vieux monsieur. Mali, Algérie, Tunisie, traversées du désert et de la Méditerranée, à 16 ans elle a affronté les dangers de la route migratoire.
À Paris, les services de Aide Sociale à l'Enfance (ASE), chargés de mettre à l'abri les personnes mineures, l'ont refusée car elle n'avait pas de papiers. À Paris, des centaines de jeunes mineurs vivent dans la rue dans des conditions indignes. Pensant trouver un environnement moins dur, Fatou est venue à Avignon. Elle a fait venir de Côte d'Ivoire ses documents d'état civil. Mais l'ASE du Vaucluse l'a également rejetée, sans aucune vérification auprès du Consulat Ivoirien.
Fatou est une battante, elle ne baisse pas les bras. Aidée par l'association ROSMERTA, elle fait établir son passeport par son Consulat, imaginant que ce document délivré par une autorité nationale serait incontestable. Elle saisit le Juge des Enfants.
La justice lui donne raison. Reconnaissant sa minorité, le Juge des Enfants ordonne son placement à l'ASE. Deux mois plus tard, le Juge des Tutelles confirme cette disposition en confiant sa tutelle à l'ASE.
Mais l'ASE n'en reste pas là : elle conteste la décision du Juge des Enfants. L'affaire est jugée en appel.
Le jugement d'appel mentionne à propos du passeport : "ce document a été délivré par un État souverain sur la base d’éléments conformes à sa législation et fait donc foi des éléments d’état civil qu’il contient. Il n’est aucunement argué que ce document constituerait un faux... Ce document justifie suffisamment la minorité de l’intéressée."
Sa minorité reconnue par quatre juges différents, Fatou reste confiée à l'ASE et entame un apprentissage en alternance d'employée commerciale. Devenue majeure en mars 2025, elle espère voir enfin le bout du tunnel, elle se donne avec énergie pour réussir son CAP et devenir autonome.
Mais l'acharnement se poursuit : en septembre 2025, Fatou est convoquée par la Police Aux Frontières pour une nouvelle enquête et une énième vérification de ses papiers.
Enfin, sans même attendre les résultats de cette enquête, la Préfecture lui notifie une OQTF en octobre 2025 ! Immédiatement, l'ASE l'expulse de son logement. Fatou se retrouve à la rue.
L'arrêté préfectoral ordonnant cette OQTF est un document administratif truffé d'erreurs grossières. Preuve du peu de soin porté à sa rédaction. Il accuse Fatou de "représenter une menace pour l'ordre public", au motif de fraude documentaire, alors que 4 juges judiciaires et un État souverain ont reconnu son état civil.
Aucune présomption d'innocence mais au contraire une suspicion systématique. Des enquêtes menées à charge. Un acte administratif mal documenté et rédigé à la va-vite... et voilà réduits à néant tous les efforts et tous les espoirs de cette jeune femme de s'insérer dans notre société et d'y mener une vie normale.
Fatou est une vendeuse hors pair, son employeur pourrait la garder et lui signer un CDI à la fin de son apprentissage. Monsieur le Préfet, Fatou n'est ni une délinquante, ni une personne dangereuse pour l'ordre public. Retourner dans son pays l'exposerait à de nouveaux viols et actes de vengeance. Elle a droit à un avenir en France ! Nous vous demandons d'annuler cette OQTF !
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