En Lozère, une banderole a été déployée dans un village, proclamant sans détour : « Un loup mort n'attaque plus ».


Les éleveurs qui manifestent aujourd'hui ne dénoncent pas seulement les attaques de leurs troupeaux. Ils dénoncent un sentiment d'abandon, un modèle agricole à bout de souffle, une montagne de réglementations, une rentabilité en chute libre. Et dans ce chaos, le loup devient un coupable idéal. Il est visible, il est "revenu", il fait peur alors qu'en réalité, il est loin d'être la principale menace pour l'élevage français.


Car les chiffres parlent. En 2023, selon l'Office français de la biodiversité, c'est environ 0,16 % des animaux qui ont été tués ou blessés par des loups. À côté, les maladies, les accidents et les problèmes liés à la filière elle-même font des ravages bien plus importants. Pourquoi, alors, focaliser toute l'attention sur le loup ?


Le plan national d'action sur le loup permet déjà des tirs dits "de défense". En 2024, plus de 200 loups ont été abattus légalement soit environ 19 % de la population français. Une saignée énorme pour une espèce encore vulnérable et protégée au niveau européen. Et pourtant, certains syndicats réclament une simplification des autorisations de tir, voire une gestion régionale qui ouvrirait la porte à des abattages illimités.


Mais tuer plus de loups n'est pas la solution. Des études scientifiques montrent même que cela peut aggraver les attaques. Lorsqu'on tue un individu dans une meute, l'organisation sociale du groupe est brisée. Les jeunes loups, désorganisés, se rapprochent alors des proies faciles : les troupeaux. L'abattage massif crée donc l'inverse de l'effet recherché. Une spirale absurde et contre-productive.


Il existe pourtant des moyens efficaces pour protéger les troupeaux : chiens de protection bien formés, bergers présents, parcs sécurisés…


Ce n'est pas le loup qui met l'élevage en péril. Ce sont les politiques agricoles court-termistes, le désengagement des pouvoirs publics, la concentration des filières, la perte de revenus des petits éleveurs. 

Tuer des loups ne fera pas revenir les boucheries rurales, ne fera pas remonter les prix du lait, ne ramènera pas les jeunes dans les campagnes.


Derrière la cible facile qu'est le loup, se cache en réalité une crise du rapport entre l'homme et la nature. Une crise où l'on préfère abattre un animal sauvage plutôt que de remettre en question un modèle productiviste à bout de souffle.


Le loup n'est pas l'ennemi. Il faut vivre avec lui, pas contre lui.